Jusque dans les années cinquante du siècle dernier, l’usage était courant dans les fermes du Kochersberg que les femmes s’occupent à la fabrication de ces grosses miches croustillantes dans lesquelles, à l’heure du repas familial, le maître de maison coupait de larges tranches pour toute la tablée. Son épouse étalait le restant de pâte, la garnissait avec des ingrédients de la ferme, crème, fromage blanc, oignons et lard, cuisait le tout dans le four à pain et réservait la dégustation à la famille, aux voisins et aux amis, sans oublier les valets également conviés aux agapes. Anne la maman de Marthe excellant dans la préparation de cet apprêt a transmis son savoir- faire à sa fille, ancienne élève de l’Ecole Ménagère de Truchtersheim et passionnée de cuisine.
En 1963, André et Marthe s’installent à l’Aigle, elle au fourneau, lui en salle, à la cave et à l’administration. Très vite Marthe rallume le four à pain maison et lui confère une nouvelle jeunesse en cuisant sur la sole brûlante de délicieuses tartes flambées. Testées par quelques habitués du restaurant, tous enthousiastes, elles sont prestement mises à la carte et le bouche à oreille aidant, l’écho de la bonne tarte flambée de l’Aigle se répand jusqu’à Strasbourg et même bien au-delà.
Marthe et André ont deux enfants. Lydia l’ainée, après une formation de réceptionniste d’hôtel, intègre l’entreprise familiale en 1998 et succède à ses parents quelques années plus tard. Philippe le cadet apprend le métier de cuisinier, effectue un compagnonnage dans de grandes enseignes et tient à présent son propre restaurant.
A ce jour Lydia procède toujours à la destinée de l’Aigle mais dans son sillage officie d’ores et déjà son fils Antoine, tombé si l’on peut dire dans la tarte flambée dès la prime enfance il a pris la peine avant de seconder Lydia d’obtenir un master en gestion, bien utile dans la direction de l’établissement. Il incarne avec talent la cinquième génération.